Le présent article traite du transistor en régime alternatif et est la suite de l’article intitulé point de repos du transistor bipolaire. Nous avions vu comment polariser le transistor en statique, c’est-à-dire le « préparer », pour amplifier le signal alternatif, celui qui vient de la guitare, dans les meilleures conditions.

Dans le présent article, nous allons donc reprendre les choses là où elles en étaient, c’est-à-dire en ayant la tension de collecteur polarisée à la moitié de la tension d’alimentation. Nous allons voir l’effet du transistor en régime alternatif sur le point de repos. Nous allons aussi voir à travers une série de simulations SPICE ce qui se passe lorsque le signal d’entrée est trop grand, conduisant à une distorsion du signal de sortie.

1 Schéma électrique

Reprenons la figure 3 de l’article cité ci-dessus, où nous avions déterminé Rb et Rc pour avoir un point de repos au niveau du collecteur à 4,5 V avec un courant de 10 mA :

Figure 1 : circuit amplificateur à émetteur commun. On choisit Rb et Rc pour que Vce=4,5 V, ic=10 mA. Ici on va s'interesser au transistor en régime alternatif.
Figure 1 : circuit amplificateur à émetteur commun. On choisit Rb et Rc pour que Vce=4,5 V, ic=10 mA. Ici on va s’interesser au transistor en régime alternatif.

Les condensateurs Cin et Cout branchés respectivement à la base et au collecteur du transistor permettent de « d’isoler » le circuit statique du reste du circuit. En effet, un condensateur laisse passer le courant alternatif, mais pas le continu. Par conséquent, la tension continue que l’on applique en B et en C n’affectera que la portion de circuit comprise entre les deux condensateurs. Ils permettent donc de polariser le transistor au point de fonctionnement voulu, sans influencer ni être influencé par les tensions continues extérieures.

Ces condensateurs s’appellent des condensateurs de liaison (voir cet article). Leur capacité est calculée de manière à déterminer le seuil de fréquence en dessous duquel les bases fréquences sont coupées. Dans nos applications, on choisit typiquement des valeurs comprises entre 100 nF (1 nano = 1 milliardième) et 1 \muF (1 \mu = 1 millionième).

2 Caractéristique Ic=f(Vce)

Figure 2 : courant de collecteur (qui passe en C) vs tension de collecteur Vce pour différentes valeurs de courant de base ib. La droite en vert est la droite de charge, elle dépend de la tension d'alimentation Vcc et de la résistance de collecteur Rc. L'ensemble de ces courbes sert à savoir pour quelles tensions et courants fonctionne le transistor.
Figure 2 : courant de collecteur (qui passe en C) vs tension de collecteur Vce pour différentes valeurs de courant de base ib. La droite en vert est la droite de charge, elle dépend de la tension d’alimentation Vcc et de la résistance de collecteur Rc. L’ensemble de ces courbes sert à savoir pour quelles tensions et courants fonctionne le transistor.

Sur la figure 2, j’ai représenté le point de fonctionnement en Q (Vce=4,5 V en abscisse, ic=10 mA en ordonnée). Il est également appelé point de repos, car il représente le fonctionnement du transistor lorsqu’aucun signal n’est appliqué sur la base du transistor.

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Lorsque l’on va jouer une note de guitare, le signal électrique que j’ai noté Ve(t) sur la figure 1, alternatif (qui dépend du temps) va passer à travers le condensateur Cin et modifier la tension entre base et émetteur. La modification de cette tension va conduire à une modification du courant de base ib. En modifiant ib, on va faire que le point de repos Q va se déplacer sur la droite de charge représentée en vert sur la figure 2. Lorsque ib diminue, Q descend vers la droite et lorsque ib augmente, Q monte vers la gauche. La tension Vce va donc osciller autour de 4,5 V comme on peut voir en abscisses sur la figure 2.

Puis, les 4,5 V constants vont être filtrés par le condensateur de liaison Cout et en sortie on obtient une tension Vs(t) qui est une réplique de Ve(t), mais amplifiée !

3 Régime non-linéaire

Tout ce que je dis plus haut est vrai lorsque la tension d’entrée Ve(t) n’est pas trop grande. En effet, le point Q a son mouvement limité à gauche et à droite, ce sont les points Q1 et Q2 que j’ai mis sur la figure 2. Dans le cas de Q1, le courant de base est trop faible et le transistor est dit bloqué. Dans le cas de Q2, le courant de base est trop élevé et le transistor est en régime de saturation. Par conséquent, si le signal d’entrée n’est pas trop élevé, Q n’atteint pas ses valeurs max et le signal de sortie est fidèle au signal d’entrée, on dit que l’on est en régime linéaire.

Par contre, si le signal d’entrée est trop grand, ses crêtes sortiront émoussées voir écrêtées. Vous pouvez voir ce qui signifie écrêté dans l’article sur la pédale de distorsion RAT. On obtient alors une distorsion du signal.

Vous avez dit distorsion ??

Je vois les amateurs de distorsion avoir les yeux qui brillent ! En effet, si on place un 2e transistor à la suite du circuit, le 1er transistor envoie un signal qui a bien la patate. Le signal qui sort du 2e transitor présentera alors beaucoup de distorsion. Et en ajoutant une boucle de contre-réaction entre les deux transistors, on obtient à peu près une pédale Fuzz Face !! Mais ceci sort du cadre de cet article et nous en reparlerons.

4 Transistor en régime alternatif : résumé de tout cela en simulation

Prenons notre simulateur SPICE et entrons le circuit de la figure 1 :

Figure 3 : circuit utilisé pour la simulation. Le résultat sur les courants et tensions apparaît.
Figure 3 : circuit utilisé pour la simulation du transistor en régime alternatif. Le résultat sur les courants et tensions apparaît.

Sur cette figure j’ai laissé les tensions et courant de repos. Comparé à la figure 4 de l’article sur le point de repos, j’ai ajouté une source de tension alternative qui simule le signal de notre guitare électrique à une fréquence de 1 kHz (un peu plus aigu qu’un « la » 15e frette sur la corde de « mi » aigu). Il y a également les deux condensateurs de liaison Cin et Cout.

4.1 Cas linéaire

Figure 4 : fonction sinusoïdale de 10 mV d'amplitude et 1 kHz de fréquence. C'est notre signal d'entrée dans la simulation.
Figure 4 : fonction sinusoïdale de 10 mV d’amplitude et 1 kHz de fréquence. C’est notre signal d’entrée dans la simulation.

Commençons par envoyer un faible signal sinusoïdal, d’amplitude 10 mV. Ce signal est représenté sur la figure ci-contre. On voit que son maximum est +/-10 mV. On voit aussi que sa période est de 1 ms. Ceci correspond à une période de 1 kHz (=1000 Hz).

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Ce signal étant alternatif va être transmi à travers Cin et arriver à la base. Comme nous l’avons dit plus haut, ceci va provoquer une oscillation du courant ic et de la tension Vce autour du point de repos Q.

Sur la figure 5 nous voyons le résultat de la simulation au niveau du collecteur en noir et après le condensateur Cout en rouge. On voit déja que la fréquence est conservée, puisque la sinusoïde de sortie a une fréquence identique à celle d’entrée. De plus, on voit que le signal noir oscille autour de 4,5 V et qu’il est de l’ordre du volt. Le fait d’osciller autour de 4,5 V est ce que l’on cherchait, pour que les oscillations puissent avoir un maximum de 9 V et un minimum de 0 V, donc tout va bien ! On constate donc que le signal d’entrée est bel et bien amplifié.

Figure 5 : résultat de la simulation. En noir : avant Cout. En rouge : après Cout.
Figure 5 : résultat de la simulation. En noir : avant Cout. En rouge : après Cout.

Cependant, la composante continue du signal de sortie est gênante, elle constitue du bruit qui nuit à la qualité du signal alternatif. C’est là qu’intervient Cout. Son rôle est de bloquer la composante continue et de ne laisser passer que la composante alternative. C’est bien ce que l’on observe, la signal (en rouge) est maintenant centré en 0 tout en conservant l’amplitude et la fréquence.

4.2 Cas non linéaire

Figure 6 : résultat de la simulation pour une amplitude d'entrée de 30 mV. Le signal de sortie commence à distordre.
Figure 6 : résultat de la simulation pour une amplitude d’entrée de 30 mV. Le signal de sortie commence à distordre.

Augmentons l’amplitude du signal d’entrée. Passons par exemple à 30 mV. Le signal de sortie une fois filtré par le condensateur Cout est celui que l’on voit à droite. On voit toujours l’aspect sinusoïdal, mais quelque peu distordu. On n’obtient donc plus une copie du signal d’entrée et le signal audio présentera donc une légère distorsion.

Augmentons encore le signal d’entrée et appliquons une amplitude de 100 mV. Cette fois-ci, le signal de sortie n’a plus rien à voir au niveau de la forme. On se rapproche d’un signal carré et le signal n’est même plus symétrique. Vous l’aurez compris, le son sera bien distordu en sortie !

Figure 7 : résultat de la simulation pour une amplitude d'entrée de 100 mV. Le signal de sortie est super distordu !
Figure 7 : résultat de la simulation pour une amplitude d’entrée de 100 mV. Le signal de sortie est super distordu !

5 Conclusion

Par conséquent, nous avons vu que pour obtenir un signal amplifié à l’identique il faut choisir un point de repos adéquat et que le signal d’entrée soit suffisamment faible. Cela est important si on veut fabriquer par exemple une pédale de boost avec un son clean sur une grande plage dynamique (en jouant doucement ou fort sur les cordes). Maintenant, si on veut rajouter du grain à l’amplification, il peut être intéressant justement de jouer avec la saturation du signal. Tout est question de savoir ce que l’on veut faire !

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