Sommaire
Introduction
Cet article est la suite d’un précédant article un peu plus théorique que j’ai écrit, sur le fonctionnement interne d’une diode : la jonction PN. J’y ai expliqué entre autres la notion de trous et de potentiel de jonction.
Mais le présent article peut se lire indépendemment ! Ici, je donne les bases sur le fonctionnement d’une diode dans un circuit, sur comment elle se branche, sur son circuit équivalent, très utile pour lire un schéma électrique. Je propose une comparaison du modèle équivalent avec une simulation SPICE, programme super intéressant et pratique pour prédire ou comprendre le fonctionnement d’une pédale. Puis nous allons comparer tout cela aux données du fabricant pour une diode 1N4148.
1 Considérations générales sur la diode
On peut faire une analogie de la diode avec la mécanique des fluides et comparer la diode à une valve. Au bout d’une certaine pression, une valve laisse circuler l’eau. En revanche, dans le sens contraire elle bloque sa circulation. Avec une diode, c’est pareil : elle ne laisse passer le courant électrique que dans un sens au-dessus d’une tension seuil.
Nous avons déjà vu dans un article précédant l’allure théorique de la caractéristique courant-tension. Je vous la remets ici pour des raisons de commodité, mais si vous voulez plus d’explication sur le pourquoi de cette allure, vous pouvez lire cet article.
Mettant de côté les phénomènes d’avalanche qui conduisent au claquage de la diode, on voit qu’au-dessus de la tension seuil, la diode conduit. Ce seuil vaut 0,7 V pour une diode au silicium et 0.3 V pour une diode au germanium. Si on regarde bien, le courant augmente non linéairement d’abord, puis linéairement. Nous allons voir comment on peut modéliser le comportement d’une diode à partir de ces observations.
2 Modélisation de la diode
2.1 Dans le cas général
Sur cette figure nous avons représenté le symbole d’une diode, l’anode (là où arrive le courant) et la cathode. Y figurent aussi la tension V à ses bornes et le courant i qui y circule.
En fonction de la tension V à ses bornes, on aura deux cas. Si V<Vseuil, la diode ne laisse pas passer le courant. Elle est alors équivalente à un interrupteur ouvert. En revanche, si V>Vseuil, le courant passe. La diode est alors équivalente à un générateur de tension constante, de tension Vseuil, en série avec une résistance r, la résistance interne de la diode. Cette résistance, est très petite, de quelques dixièmes d’ohm à quelque ohms [1].
La caractéristique courant-tension (que je noterai I-V dans la suite) de la diode modélisée ainsi à l’allure montrée à droite. Le courant est nul jusqu’à la tension Vseuil puis augmente de manière linéaire avec une pente 1/r. On peut noter que plus la résistance interne r de la diode sera petite, plus 1/r sera grand. Donc plus ce bout de courbe se rapprochera d’une droite verticale.
On rappelle que Vseuil est équivalent au potentiel de la jonction PN interne à la diode et que pour V compris entre 0 V et Vseuil, l’évolution du courant avec la tension est exponentielle (les curieux pourront aller voir cet article).
2.2 Dans le cas idéal
Dans le cas idéal, on pourra supposer que la tension seuil est 0 V. Ce sera le cas en pratique lorsque les tensions mises en jeu sont bien plus grandes que Vseuil.
On peut pousser l’approximation encore plus loin. Dans la plupart des cas, la diode sera en série avec une autre résistance pour limiter le courant. En général, cette résistance sera de l’ordre de 1-10 kohms (voir cet article). Ainsi, la résistance interne r de la diode de quelques ohms au maximum est très petite devant cette résistance série. On peut par conséquent considérer que r est nulle. Par conséquent, au-delà de la tension seuil (que l’on suppose nulle ici) la caractéristique I-V est verticale et la tension est constante et nulle.
Nous allons maintenant comparer ces modèles théoriques avec la simulation en utilisant le programme SPICE.
3 Simulation SPICE d’une diode
Pour étayer mes propos, j’aurai pu les confronter à des mesures expérimentales, mais j’ai préféré simuler la caractéristique I-V d’une diode pour faire la comparaison. La caractéristique a été simulée par un logiciel informatique qui s’appelle PSPICE, utilisant le code SPICE.
C’est un super logiciel, dont on peut trouver une version de démonstration gratuite sur internet. Je l’ai découvert lorsque je donnais des cours d’électronique appliquée sous forme de travaux pratiques à Barcelone. J’ai appris à l’utiliser sur le tas et pour faire des petites simuls le programme n’est pas trop difficile à manier ! Voyons donc ce que nous montre ce petit bijou de programme.
3.1 Pour des tensions petites
Pour cela j’ai choisi une diode 1N4148, parce qu’elle est fréquemment utilisée dans les pédales d’effets (ou son équivalent plus ancien 1N914). On la retrouve par exemple comme diode de soft-clipping dans la TS-808 ou de hard-clipping dans la Big Muff Pi, la RAT. C’est une diode au silicium qui est disponible dans la libraire de PSPICE. Sur le circuit j’ai branché la diode sans résistance en série (chose à ne pas faire en pratique). Cela me permet de voir le comportement linéaire de la diode vers 1 V sans influence du circuit.
Le générateur de tension est V1, je l’ai fait varier de -1 V à 1 V par pas de 0,01 V. On obtient la caractéristique I-V suivante, bien similaire à la première figure de cet article. En particulier on voit l’existence d’un courant au-delà de 0,7 V, valeur typique du seuil pour le silicium.
3.2 Croissance exponentielle
J’ai voulu vérifier qu’en dessous de la tension de seuil la croissance du courant est exponentielle avec la tension. Mais on ne peut pas l’apprécier sur la figure précédente, car le courant est tellement petit qu’il est ramassé sur l’axe horizontal (des abscisses).
Cependant, un recours que l’on a et qui est bien utile est de mettre l’axe des ordonnées en échelle logarithmique. Pour ceux qui ne connaissent pas, dans cet article je parle plus en détails des fonctions logarithme et exponentielle. Le tout en peu de mots et sous un angle pratique. Et là oh miracle ! On voit que de 0 V à la tension seuil, on a une droite. Une droite ? En échelle log ? Exactement ! Cela signifie qu’on retrouve bien que de 0 V à Vseuil, le courant évolue de façon exponentielle avec le courant.
On voit également que pour les tensions négatives le courant est constant, de l’ordre du nano-ampère (1/1000.000.000 A). C’est le courant de saturation ou de fuite dû aux porteurs minoritaires que l’on a commentés dans cet article.
3.3 Cas des des tensions plus grandes
Finalement, j’ai voulu voir ce qui se passe en simulant une tension de générateur plus élevée, disons jusqu’à 2 V. On trouve superbement bien que la caractéristique devient linéaire au-dessus d’environ 1 V. En faisant un ajustement linéaire on trouve que 1/r=1,68. On en déduit donc une résistance interne de la diode (introduite par les programmateurs du simulateur) r=0,59 ohm.
4 Comparaison avec une I-V fabricant
Enfin pour finir on va comparer ce que l’on a appris avec une caractéristique donnée par un fabricant de diodes. Cette figure montre le courant qui passe dans la diode en fonction de la tension appliquée, en polarisation directe. Notons que l’axe vertical est en échelle logarithme. Il y a deux courbes, car le fabricant stipule que les composants qu’il fabrique ont une fourchette d’erreur. Il donne donc des valeurs comprises ente une valeur minimale et une valeur maximale.
Là aussi, on retrouve bien l’évolution exponentielle avant 0,7 V. Cette courbe est bien utile pour par exemple déterminer la tension aux bornes de la diode lorsque le courant est de 10 mA. En lisant 10 mA sur le graphe, on obtient une tension aux bornes de la diode comprise entre 0,7 V et 0,85 V.
Conclusion
Dans cet article, nous avons vu ce qu’est une diode sous plusieurs approches. Une théorique qui nous permet, selon le contexte de modéliser la diode avec des composants « simples ». Cela sera utile pour comprendre les schémas électriques. Une approche par simulation, qui est nous servira surtout lorsqu’il y a beaucoup de composants. Enfin les datas données par le fabricant sont nécessaires pour prévoir entre autres la relation courant-tension des diodes.
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Références
[1] F. Manneville, J. Esquieu “Théorie du signal et composants”, Ed. Dunod
[2] https://www.vishay.com/docs/81857/1n4148.pdf